Pourquoi choisir une selle courte ?

Chaque fabricant propose son modèle de selle courte, avec un bec raccourci ou même sans bec. Confort, performance, aspect pratique, on vous dit tout sur ces modèles…

C’est quoi une selle courte ? C’est une selle qui fait moins de 270 mm. Mais la selle n’a pas été réduite de façon homothétique, c’est le bec qui est raccourci, voire supprimé sur certaines marques. Pour l’UCI, une selle doit mesurer entre 24 et 30 cm de long, article 1.3.014. Et ce n’est pas la seule contrainte puisque le recul minimum, pris entre la verticale de la boîte de pédalier et le bec de selle, ne doit pas être inférieur à 5 cm, article 1.3.013. Quel intérêt à choisir une selle courte ? Gain de poids ? D’ergonomie, de confort, d’aérodynamique ? De tout cela ?

Une selle certes, mais deux appuis seulement…

La selle est l’un des trois points d’appui du cycliste avec le guidon et les pédales. Mais sur la selle en elle-même, le corps repose sur deux (en fait trois) zones et non pas sur la totalité de la surface. Car une selle, c’est normalement un croissant où s’appuient les ischions (les os du bassin), un « double » appui « dur », et un bec où repose le périnée, des tissus « mous ». Pour préserver un certain confort, immédiat mais aussi sur la durée, il faut que l’appui ischiatique soit le plus sollicité des deux. Pour les divers fabricants de selle, l’appui ischiatique s’applique à l’endroit où la selle fait entre 7 et 8 cm de large. Pour Vincent Blondeau de Mécacote (études posturales), on s’assied dans le creux de selle, point le plus bas de la selle donc, très souvent situé lui aussi entre 7 et 8 cm de largeur de la coque… Quand on règle sa position et donc son recul de selle, il vaut mieux prendre cette zone de référence plutôt que le bout du bec pour être sûr de placer le bassin au bon endroit par rapport au pédalier. Car d’un modèle de selle à l’autre, voire d’une selle à l’autre, l’implantation de cette zone peut varier…

L’avantage évident, mais pas le plus pertinant…

Avant, il n’était pas rare de couper le bec de selle pour obtenir une avancée maximale mais « légale ». Choisir une selle courte permet de conserver son matériel en l’état. Et d’avancer le bassin du cycliste tout en respectant les normes UCI sur le recul de selle. Cette position avancée donne en effet plus de force pour pédaler (on ne parle pas de puissance) avec de grands braquets. Un peu comme quand on se place sur le bec de selle pour un effort intense. Ceci explique son adoption sur les vélos de contre-la-montre et de triathlon. Avec certains excès toutefois. Mais pour la route ?

Le bec, ce faux ami…

Aussi bizarre que cela puisse paraitre on peut faire du vélo sans que le périnée ne touche la selle ! Les selles ISM connues des triathlètes et les selles Proust n’ont pas de bec, les SMP ont des becs inclinés. On se contente alors de l’appui ischiatique, un peu comme si on était assis sur le bord d’un tabouret de bar… Mais avec une selle « normale » une partie du poids du cycliste repose sur le croissant et une autre sur le bec. Et donc le périnée avec ses tissus mous compressibles.

Les douleurs au niveau de cette zone ne sont pas à prendre à la légère, car il y a des gènes passagères et d’autres nettement plus durables. On peut en effet appuyer sur le nerf honteux qui déclenche l’énurésie (pour les deux sexes), sur la prostate (homme) et sur la vulve (femme), cela peut aussi créer des kystes, des échauffements, etc. Spectaculaire, mais moins durable et moins gênant, l’appui peut également anesthésier tout l’appareil urogénital. Surtout si la selle est mal réglée et que le bec penche vers le bas. Ou qu’on adopte une position très aéro avec un cintre beaucoup plus bas que la selle et qu’on soulage l’appui ischiatique en augmentant l’appui périnéal… Le bec sur lequel on a tendance à s’avancer alors peut donc vite causer gênes et désagréments… C’est une bonne raison de choisir une selle courte dont la vocation est de diminuer ces « problèmes ».

Une assise plate…

La forme de l’assise de la selle peut être creuse, plate ou ronde, mais cela ne change pas le nombre de zones de contact. La forme permet juste de modifier ou de fixer la position du bassin du cycliste sur la selle au cours de l’effort… La selle courte a une assise plate et conserve son croissant. Celui-ci est souvent augmenté en surface, tandis que le bec est raccourci de 3 cm en moyenne. On peut donc un peu s’avancer sur ce type de selle. Un peu… On a cependant intérêt à être bien posé avec un bassin « stable » avant d’envisager de choisir une selle courte car les possibilités de mouvements sont quand même limitées. Alors quels intérêts et quelles incidences ?

Qu’est-ce qu’on gagne à choisir une selle courte ?

En dehors du gain de force évoqué plus haut, le bec raccourci d’une selle courte diminue la zone de contact avec le périnée. Cela permet de soulager la pression sur le périnée quand on adopte une position plongeante ou aérodynamique et que le bassin « tourne » un peu vers l’avant. On met plus facilement les mains en bas du cintre, on reste ainsi plus longtemps et on gagne en aérodynamique. Les chocs de la route sont moins transmis au périnée ce qui améliore le confort global. Le bec « court » facilite également le passage des cuisses surtout quand elle sont « grosses ». Mais surtout, cela favorise l’appui ischiatique permettant dès lors une meilleure transmission de la force.

Le croissant se transformant presque en appui lombaire, le calage est alors optimal. Mais pour cela il faut être « posé » et ne pas trop bouger. En résumé avec une selle courte, on est plus aérodynamique, on a plus de force et de confort. Il y a également un petit gain de poids (20 à 30 g), ce dernier point est vraiment négligeable. Mais…

Qu’est ce qu’on perd à choisir une selle courte ?

Si on est bien « posé » et qu’on a un coup de pédale stable, choisir une selle courte peut donc être un gros plus. Mais si maintenant on a tendance à bouger et besoin d’aller sur le bec quand l’effort augmente, ce ne sera pas la panacée, loin de là… Certains cyclistes se calent à l’arrière de la selle pour grimper par exemple et s’avancent pour prendre une posture plus profilée sur le plat. Dans ce cas, la selle courte est tout de suite moins adaptée. Ensuite au niveau du pilotage du vélo, il y a une incidence « psychologique ». Avec une selle « normale » on pilote avec les cuisses, avec une selle courte avec le « bassin ». Enfin c’est l’impression qu’on a, car en fait cela n’a pas d’incidence. Sauf sur le ressenti… Ensuite suivant comment on se se rassied sur la selle après un pédalage en danseuse, cela peut être plus ou moins confortable et agréable. On peut également avoir le besoin de se repousser vers l’arrière de peur de glisser… Bref, il faut s’adapter, mais ce n’est pas toujours possible, ni agréable… On remarque que chez les pros, ce sont plus les rouleurs et baroudeurs que les sprinters qui utilisent les selles courtes. Mais il y a des exceptions comme Mark Cavendish. Issu de la piste, le natif de l’ile de Man utilise une position avec un grand écart selle cintre et apprécie de la sorte la diminution de l’appui périnéal.

Une offre importante

Toutes les marques de selles proposent des selles courtes, certaines ont même des familles complètes de selles raccourcies. Bontrager propose les Aeolus, fi’zi:k les Argo, Prologo les Dimension, Repente la Magnet et la Latus. Giant a de son côté les Fleet, Fabric les Line-S tandis que Specialized propose les Power. Enfin Selle Italia décline de nombreux modèles de sa gamme « normale » en versions Boost alors que San Marco fait de même avec les Short Fit adaptées là encore de nombre de modèles courants.

Avant de vous précipiter sur un modèle, assurez-vous déjà que votre bassin est positionné au bon endroit et que votre selle actuelle est bien réglée ! Car une selle courte ne corrige pas tout les problèmes…